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Cécile en février 2013 #14

« Elle n’arrête pas son travail l’Inuit et toujours en riant car pour survivre, dit le conte, le chasseur et la couturière opposent au froid un grand rire intérieur, le rire du caribou, un rire d’une grande allégresse »

Marie Faucher – conte des femmes qui veillent –


« Le cancer n’est pas une objection à la vie »

Bertrand Vergeley - retour à l’émerveillement-




Plus souvent hôte des montagnes que de notre plat pays, la neige nous a offert de belles lumières ce mois-ci. Comme vous probablement, je me suis régalée de son bruit si particulier quand elle crisse sous les pas. J’ai tendu l’oreille aux cris des enfants. Ils sont heureux de se faire peur à grande force de batailles de boules de neige, avec enfin le « droit » de se rouler par terre en riant aux éclats !


J’ai échappé au froid, à la grippe, mais Février 2013 restera ce mois de l’« entre-deux » : Je ne vais ni bien, ni mal. Voilà maintenant 14 mois non-stop que je suis en cure. Je devrais être habituée à ces gros vides d’énergie et pourtant ce n’est toujours pas le cas. Ces yo-yo sont éprouvants et ma résistance physique est moins souple.


Plus le bilan médical se rapproche, plus mon psychisme se met en alerte… Et paradoxalement tout mon être conscient se mobilise vers… l’immobilisme !

Un patient en attente de bilan a l’impression de vivre dans un no man’s land. Il est comme un animal aux abois qui sait qu’il n’échappera pas à la sentence. Ne plus respirer, faire le moins de bruit possible, se faire toute petite. Imaginer, espérer que le temps suspendra son vol et que toute l’histoire de la maladie sera alors effacée, d’un coup d’un seul !...

Mais la patiente que je suis sait qu’elle ne rêve pas, qu’elle ira sagement sous les différents appareils afin qu’un médecin ait accès à son intime, l’intérieur de son corps… Elle sait qu’avant moi, il saura à « quelle sauce je vais être assaisonnée »… pardon, « à quels traitements je vais devoir me soumettre ».

Je vous assure, c’est un sentiment très étrange.

Alors, on peut tout à la fois avoir envie de fuir et de savoir.

Nous devenons tellement dépendants d’une image, d’un relevé de traceur dans notre corps, qu’on en perd la sensation réelle de la vie qui circule en nous et donc de l’espoir.


Je sais bien qu’il n’y a pas une solution miracle pour vivre détendue.

La plus humaine étant pour moi d’être juste là, présente, à l’écoute du besoin de mon âme.

J’ai alors tenté de prendre régulièrement le temps de m’émerveiller de tout, de rien car à chaque fois, la magie opère en moi, je respire mieux et donc mon corps va mieux. Parfois, il fallait me stimuler pour aller marcher, sortir de ma « bulle de protection », bouger mon corps. A d’autres moments l’amitié, qui crée le rire ou la complicité, m’a ouvert le bonheur. Oui, je peux l’écrire, j’ai passé ce mois, malgré tout, des merveilleux moments d’amour, d’amitié, de vie.


Petite parenthèse « Sport et Santé » : Savez-vous comment parler « sport » à un malade? Dans mon ancien job c’était un vrai challenge, rarement atteint, de mettre au sport les patients. Pourtant, il est prouvé que le sport améliore la santé alors pourquoi, nous les patients, ne nous y mettons nous pas ? Vaste débat… qui commence, je crois, par le fait que les soignants n’utilisent pas les bons mots. Dites « sport, réhabilitation à l’effort… » à un patient et il en sera fatigué d’avance.


Revenons à Février… mois cotonneux, dans un sentiment d’entre deux…

Entre deux bilans mais aussi entre deux médecins : En effet, j’ai dû en changer puisque mon oncologue, en arrêt maternité, m’a confiée à un de ses collègues. Ceux à qui c’est déjà arrivé pourront confirmer combien c’est déstabilisant.


Je me suis fait des films dans la tête : Que va-t-il me dire, me demander ? Va-t-il s’intéresser à moi ? Va-t-il approuver ou critiquer mon chemin ? Le féliciter ou n’en rien dire ? Va-t-il prendre le temps de me rassurer ? Va-t-il me donner la bonne thérapie ?

Sait-il que j’ai peur même si j’ai l’air d’une grande dame ?

A l’intérieur j’ai 5 ans et j’ai tellement envie qu’il me dise tout doucement, tranquillement : « Madame je suis content de faire votre connaissance ; j’imagine bien que ce n’est pas facile de changer de médecin… Cela vous fait peut-être un peu peur, mais je vais prendre soin de vous. Il est magnifique votre parcours, votre médecin m’a déjà fait des transmissions, mais vous-même, racontez-moi… Comment allez-vous ? Que puis-je pour vous ? »


En réalité, ce n’est pas tout à fait ce qui s’est passé… Il a oublié l’étape « réassurance du patient » pour aller, certes avec gentillesse, directement à l’étape suivante du « comment allez-vous ? », genre : revue de paquetage. Puis au moment de prendre les rendez-vous pour le bilan, il s’est adouci et m’a dit que je pouvais le contacter quand je le voulais. Il a été « factuel sympathique », ce n’est déjà pas si mal ! Je retournerai le voir presque sans crainte…


Finalement, peut-être que nous, les patients, nous faisons peur aux médecins… Peut-être sont-ils inquiets qu’on prenne trop de leur précieux temps, qu’on chamboule leur planning, que l’on soulève en eux trop d’émotion ?

Pas facile, le métier de toubib, dans des pathologies aussi lourdes… Alors, oui, je rends grâce à leur envie de me guérir et m’émerveille des progrès de la science.

Merci à vous tous, mes toubibs.


Quant à toi, lecteur, puisses-tu, avec moi, avancer pas-à-pas vers le printemps avec la joie d’être aimé. Si tu n’en n’as pas ou que peule sentiment, c’est peut-être que tu ne prends pas le temps de t’émerveiller de qui Tu es, de la façon dont la vie circule en toi et dont elle circule dans l’espace entre toi et l’autre.


Nous sommes des Etres en évolution permanente, animés d’un Souffle de Vie si insensé qu’il en est miraculeux.


Je t’embrasse,

Cécile

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