Ce blog vous partage ma vie depuis bientôt 4 ans. Une vie fouettée par le mot et la réalité « CANCER, stade 4 ».
Si l’annonce de la maladie, les soins, la fatigue m’ont propulsée dans un monde que je croyais pressentir, ayant travaillé de nombreuses années à l’hôpital, en fait je n’avais pas compris grand chose.
Qui sommes nous pour oser dire que l’on comprend ce que nos cellules n’ont jamais eu à traverser ?
Revenons sur mes derniers mois. En mai, le cancer s’emballe, flambe. Le foie triple de volume bousculant tous mes organes qui se déplacent dans mon ventre. Philippe vous appelle à l’aide. Moi, je n’ai plus le choix, je me laisse faire. J’accepte d’être « petite, toute petite, vulnérable ».
En même temps je vis ma vie autrement : finis l’art thérapie, le massage. Je diminue les balades, les câlins avec mon chat. Presque plus de prières, de psy, d’appel aux ami(e) s.
Juste être au creux de mon lit, habitée de mes ras-le-bol, je me laisse être une bulle embarquée dans l’Amour Divin.
De bonnes âmes me disent « Dis oui à tout et ta vie sera plus facile… ». Faible, j’obéis mais pas exactement comme ils l’imaginent. Je dis Oui à mon NON. Je dis Oui à ce qui ressemble à une déprime. Je plonge dans cette étrange sensation d’être là sans y être. Juillet, ma lettre vous l’exprime clairement.
Regardant à nouveau ma vulnérabilité, je laisse faire les secondes… sans rien demander d’autre que de me sentir portée par une main majestueuse dans laquelle tout mon corps tient. La main de Marie ou du Souffle de Vie, Dieu… Main d’amour avec toutes vos mains réunies, vos messages en guise de matelas d’amour. Je laisse mon destin se jouer sans mon mental.
Et petit à petit, j’en suis la première surprise, les émotions reviennent, mon être se réveille ici, avec vous tous.
Bien sûr, sur le moment, je ne me rends pas compte de tout cela, ce n’est qu’après que je peux analyser mon comportement :
Il y a 4 ans, je me suis accrochée à ce que je savais et je me suis soignée « comme je croyais le mieux de le faire ». Ce fut une excellente idée qui remporta un certain succès. Mais au fil du temps, avec mes capacités physiques qui sont bouleversées, mes besoins et envies qui évoluent, ma façon de me soigner se simplifie.
Depuis plusieurs mois, je suis donc dans un virage. Mon être appelle à un « vivre autrement ».
A chaque fois que je résiste, la déprime m’envahit comme pour me dire « coucou, laisse toi plonger dans ton nouveau monde, va chercher tes ressources bien au fond de toi, tout y est ».
Finalement, mon chemin fait un nouveau pas… jusqu’au suivant !
Depuis mai, donc après 8 cures de mon nouveau et quatrième protocole de chimiothérapie, le bilan de cette semaine est positif. Scanner stable, le foie a régressé pour retrouver sa taille normale, les organes ont repris leur place, l’activité cancéreuse diminue un peu, les marqueurs sanguins continuent de baisser. Gratitude.
Mon cancer pancréas-foie est toujours en activité, je sais que ce cancer est chronique, fait de hauts et de bas, mais les docs respirent, le traitement fonctionne au delà des espérances. Et je peux, pour la première fois depuis 4 ans, manger un carré de chocolat, le savourer et le digérer.
Je laisse le mot de la fin à Nicolle Carré qui, au travers d’un mail qu’elle m’a envoyé en juillet, exprime si bien mon vécu. Attention, ne vous y trompez pas, son mail est infiniment positif.
"Vous avez tant lutté pour vivre, vous avez été si courageuse jusqu’à maintenant, vous avez rassemblé tant et tant de gens, à commencer par les vôtres, dans une marche d’amour ! Permettez- moi de vous dire que je sens votre envie de mourir comme un pas de plus, le pas que vous pouvez faire maintenant. Je me souviens très bien de cette envie de ne plus vivre (et non pas de mourir) quand tout était lourd, à commencer par porter mon corps. C’est une petite porte pour une grande porte.
Vous avez lutté pour la vie. Maintenant laissez le Christ lutter en vous. Il n’est plus nécessaire d’être forte. Parce que vous êtes petite vous pouvez recevoir pleinement ; tout peut vous être, nous être donné à la mesure où nous acceptons d’être petits. Etre petites, non pas comme une résignation mais comme une plénitude. Ce qui vous est proposé c’est la vie en plénitude ; cela est incomparablement plus grand que mordre à la vie.
Vous ne mourrez que lorsque l’heure sera venue, pas avant. Et acceptant cette mort, vous mourrez vivante, vous mourrez en transmettant la vie.
J’avais senti : juste accepter de me laisser aller, laisser aller le souffle."
Nicolle Carré.